« Moi, j’applique un principe efficace avec mes collaborateurs. Je leur dis toujours, si vous avez un problème, trouvez d’abord une solution à proposer avant de venir me voir ! »

Combien de fois ai-je entendu ce principe classique quasi-universellement reconnu dans la bouche de managers que j’accompagne !

Et si les choses n’étaient pas si simples que cela ?

Un jour, lors d’un coaching d’équipe, un collaborateur m’a avoué en entretien : « Notre chef ? On ne peut pas compter sur lui, si on a un souci ! Pas la peine d’aller le voir, il veut toujours une solution. Mais si je l’avais, la solution, je n’aurais pas besoin de venir le voir ! »

Alors que penser de ce principe classique ? Peut-être a-t-il des limites, voire des risques. Penchons-nous sur la question en utilisant une modélisation théorique du travail en équipe reconnue par la recherche scientifique : celle de Belbin®. D’après Belbin, il y a neuf manières de contribuer à l’équipe, appelées les rôles en équipe. Chacun de nous a une préférence, un talent pour certains de ces rôles. Pour qu’une équipe soit performante, il s’agit pour le manager de trouver comment reconnaître, valoriser et activer les rôles préférés de chaque équipier.

L’un des ces rôles, le Priseur (Monitor Evaluator, en anglais), correspond à la capacité à « mettre le doigt là où ça fait mal ». Les personnes qui sont fortes dans ce rôle, ont un côté judicieux, perspicace et critique. Elles détectent et priorisent les problèmes bien souvent, avant les autres. Un autre rôle est celui du Concepteur (Plant, en anglais). Celui-ci produit les idées, amène des solutions et génère de l’innovation.

Reprenons notre principe classique : « Si vous avez un problème, cherchez d’abord une solution ! ». Or le talent de détecter les problèmes est un rôle en équipe (Priseur), celui d’imaginer des solutions créatives en est un autre (Concepteur). Nous pouvons être fort dans l’un de ces deux rôles, dans les deux ou dans d’autres. Imaginez que mon/ma collaborateur/trice soit un Priseur fort. Il/elle est typiquement la ressource dont mon équipe a besoin par sa capacité à pointer du doigt ce qui ne va pas. Seulement cette personne n’est pas forcément un bon Concepteur (trouveur de solutions). Avec notre principe « classique», nous demandons à nos collaborateurs de cumuler deux talents différents, pas toujours présents ensemble dans la même personne ! Résultat : en tant que manager, je risque de créer une autocensure au près de certains équipiers et je me coupe de signaux d’alarme utiles…

Alors comment faire ? Le principe classique a un intérêt : il permet de sortir du registre de la plainte. Alors, plutôt que de demander une solution à chaque fois qu’on amène un problème, je propose de travailler avec les équipiers sur la formulation de leur problème. Il s’agit d’énoncer un problème comme un objectif. Au lieu de dire « Chef, on ne va pas avoir assez de place dans le bureau pour les nouveaux embauchés !», on annoncera plutôt « Chef, il nous faut doubler le nombre de places de travail d’ici 6 mois, à cet étage ou ailleurs ». Un problème est l’écart entre une situation réelle et une situation désirée. Quand nous formulons ainsi le problème, il se transforme en objectif et là, nous retrouvons cet état d’esprit proactif recherché. Tout l’art du manager sera alors d’accueillir le problème, de le valider ou pas, et d’activer l’équipe autour de la co-création de la solution. Et là, les autres collaborateurs qui aiment jouer le rôle de Concepteur (comment atteindre l’objectif) auront de quoi s’amuser…

Auteur: Annick Milet, associée à l’Institut ODeF, experte ASFC en Leadership

Source: Institut ODef

 

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